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AUPA NINTENDO
17 mai 2007

LOCALISATION

Dans le cas d'un jeu tel que "Hotel Dusk: Room 215", la localisation est primordiale.
Le service de Localisation et de Test de NOE, situé à Francfort, en a pleinement conscience et c'est pour cela qu'ils donnent le maximum pour réaliser les meilleures adaptions pour les différents marchés européens.
NINTENDO a demandé à l'équipe de localisation de Hotel Dusk : Room 215 de parler des problèmes qu'ils ont pu rencontrer au cours de cette phase.    

"
(...)
Paul Logue : "Bonjour, je m'appelle Paul Logue. En tant que Producteur, j'étais responsable du processus de localisation de Hotel Dusk et de sa coordination au jour le jour. Ce que cela recouvre exactement ? Eh bien, outre les tâches quotidiennes : brainstorming, répartition du travail, problèmes à résoudre... je devais m'assurer que le jeu serait prêt dans les délais et correspondrait à la vision de départ de CING.
Accessoirement, je servais aussi de bureau des réclamations pour les traducteurs !" (rires)    

Mark Boyle : "Je m'appelle Mark Boyle et je suis traducteur japonais-anglais. Mon travail a consisté à adapter la traduction de NOA pour le marché anglais et à retraduire certains passages directement depuis le japonais. Hotel Dusk a été le premier grand projet sur lequel j'ai travaillé."    

Frédéric Venet : "Je m'appelle Frédéric Venet et j'étais responsable de la traduction du japonais vers le français de Hotel Dusk. Tout comme Mark, il s'agissait de mon premier "gros" projet en tant que traducteur.
Depuis j'ai travaillé sur d'autres projets importants."    

Fabrizio Cattaneo : "Bonjour, je m'appelle Fabrizio Cattaneo et j'étais le traducteur japonais-italien du jeu. Je dois admettre que Hotel Dusk était aussi ma première expérience sur un aussi gros titre ! J'ai d'autres projets en cours, mais je ne peux malheureusement pas vous en dire plus !"    

Thomas Ito : "Je m'appelle Thomas Ito et j'étais responsable de la version allemande du jeu. J'ai également travaillé sur d'autres jeux tels que "Mario & Luigi : Superstar Saga" pour Game Boy Advance, "Paper Mario : La Porte Millénaire" pour Nintendo GameCube et "The legend of Zelda : Twilight Princess" pour Wii. Certains de ces jeux ont été traduits avant mon mariage. Je n'apparais dans les crédits que sous mon nom de jeune fille..." (rires)    

Raúl Arol : "Bonjour. Je m'appelle Raúl Arol et j'étais responsable de l'adaptation espagnole de Hotel Dusk. L'an passé, j'ai coordonné la localisation en espagnol du jeu Square-Enix "Kingdom Hearts II". J'ai également traduit d'autres jeux tels que "Red Steel" et "Warhammer : Mark of Chaos"."    

NINTENDO : Pouvez-vous expliquer à nos lecteurs ce que représente la localisation d'un jeu en général, et de Hotel Dusk en particulier ? Quelles sont les différentes étapes du projet ?    

PL : "Bien sûr. Pour simplifier, chaque projet réalisé ici suit le même processus. Nous commençons par établir un planning, baliser le projet et repérer les problèmes potentiels. Le traducteur traduit ensuite le texte, adapte certains passages en fonction du public et du pays concernés et, dernière phase, il revoit sa traduction pour la rendre plus homogène. Il nous a fallu environ quatre semaines pour traduire Hotel Dusk."
"Puis vient la phase de test au cours de laquelle une équipe de locuteurs natifs vérifie que tous les textes sont corrects et que le jeu fonctionne sans problème. Cette étape a pris trois semaines pour Hotel Dusk. Enfin, sur le plan logiciel, nous disposons d'une dernière série de tests afin de nous assurer que le logiciel fonctionne correctement.    
"Pendant ce temps, notre équipe d'illustrateurs travaille d'arrache-pied sur le manuel et l'emballage et, lorsque les deux parties sont terminées, logiciel et illustrations, il ne reste plus qu'à réunir le tout et à commercialiser le produit fini."    

NINTENDO : Et en termes de volume, que diriez-vous de la localisation de Hotel Dusk ? Combien de personnes ont travaillé sur ce projet ?    

PL : "Au tout début, nous étions partis sur un volume d'environ 80 000 mots anglais, mais nous avons atteint 120 000 mots à la fin de la phase de traduction. Pour vous donner une idée, "The Legend of Zelda : Twilight Princess" représente un volume de 150 000 mots, tandis que "New Super Mario Bros." ne compte que 3 000 mots.    
"Bien entendu, il est impossible de prendre en compte uniquement le volume pour calculer le temps nécessaire à la traduction. Cela dépend également de la nature du texte en question. S'agit-il d'un jeu de plateforme classique ? Le traducteur devra-t-il se creuser un peu plus la tête pour rendre le texte original ?
"Ce qui nous a le plus posé problème lors de la localisation de Hotel Dusk a été comment conserver cette ambiance mystérieuse et tendue qui pourrait attirer un public plus âgé. Inutile de vous dire que nous ne voulions en aucun cas plomber le texte en essayant de trouver une sorte de format commun entre toutes ses langues. Heureusement, CING comme NCL ont toujours soutenu nos décisions. C'est pour cette raison que notre petite troupe de brillants traducteurs a eu les coudées franches pour que les dialogues sonnent bien dans leurs langues respectives.    
"Quant au nombre de personnes qui ont travaillé sur ce jeu au sein de NOE... Au plus fort du projet, nous avons eu 10 traducteurs, 40 testeurs hors pair, 2 coordinateurs de test et beaucoup d'autres personnes pour nous soutenir. Pour un seul projet, cela fait du monde."

NINTENDO : Avez-vous travaillé à partir du texte japonais ou avez-vous utilisé la version traduite par l'équipe de localisation de Nintendo of America ?    

PL : "Dès le début du projet, nous avons pris la décision de rester le plus proche du texte japonais original. Ceci dit, nous avons rapidement réalisé que l'équipe de NOA avait apporté de subtiles modifications au jeu qui renforçaient encore l'atmosphère et l'authenticité du jeu.    
"Nous nous sommes retrouvés dans une situation enviable, à savoir prendre le meilleur des deux versions et je suis persuadé que cela se sent dans nos traductions. A part peut-être pour la version anglaise pour le Royaume-Uni qui devait simplement être adaptée de l'anglais des Etats-Unis pour la rendre plus compréhensible pour les joueurs anglais. Mais je crois que Mark est mieux placé pour en parler..."    

MB : "Merci Paul. Je dois d'abord reconnaître que la localisation réalisée par NOA était tout à fait digne d'un polar classique. Kyle Hyde était très bien dépeint... Cet humour assez cynique et cet air d'avoir tout vu qui lui collait parfaitement.    
"Pour ce qui est de l'adaptation au public anglais, le jeu met en scène un ancien détective new-yorkais qui séjourne dans un hôtel dans la banlieue de Los Angeles. On ne voulait surtout pas lui donner un accent ou un parler cockney. J'ai donc essayé d'aborder la localisation par touches très légères.    
"Je ne vais pas dire qu'il y a des différences culturelles insurmontables. Les gamins anglais grandissent avec les séries policières américaines et les polars de Raymond Chandler ou James Ellroy sont très populaires. Ceci étant dit, certaines expressions m'ont laissé perplexe et j'ai préféré les modifier. Idem pour les nombreux mots de la langue courante qui peuvent avoir un sens différent en anglais américain."    

NINTENDO : Hotel Dusk est un jeu se déroulant aux Etats-Unis développé par des Japonais que vous avez dû adapter pour l'Europe. Y a-t-il des moments dans le jeu où vous avez senti ces différentes influences et avez-vous rencontré de gros problèmes lorsque vous l'avez adapté pour l'Europe ?    

MB : "Je pense que l'image qu'ont les Japonais des Etats-Unis est en grande partie véhiculée par les mêmes films, séries ou romans que les Anglais regardent ou lisent. Bien que le jeu ait été développé au Japon, il n'offre pas une vision artificielle et stylisée de l'Amérique comme cela aurait pu être le cas. Il a tout à fait le ton ou l'esthétique des films ou des romans noirs américains."    

RA : "L'atmosphère que l'équipe de développement a réussi à rendre avec l'histoire et les personnages est vraiment excellente. Très proche des portraits que vous pouvez retrouver dans les polars ou les films. Les joueurs espagnols connaissent les films et les romans noirs américains et leurs codes. Nous avons donc essayé de tirer parti de cette connaissance et de recréer le jeu comme une de ces histoires."    

FC : "Personnellement, j'ai rencontré quelques problèmes car certaines réalités américaines ne sont pas forcément très claires pour le public italien. Les Italiens regardent des films américains, c'est certains, mais ils sont perdus lorsque vous leur demandez la recette des pancakes ou bien où se trouve l'Utah. Je pense que les Italiens ont une vision trop floue des Etats-Unis. Cela peut paraître idiot, mais on pourrait presque dire que le Japon est plus proche des Etats-Unis que l'Italie ne l'est. En fait, l'image véhiculée dans le jeu reprend de nombreux éléments américains courants dans la société japonaise tels que des aliments, des stéréotypes, etc. Ces éléments étaient difficiles à transposer dans un contexte italien car ils ne sont pas aussi bien connus qu'au Japon. Mais c'est aussi pour relever ce genre de défis qu'on devient traducteur !" (rires)    

FV : "Le fait que ce jeu ait été si bien ancré sur les plans géographique et stylistique m'a donné une certaine liberté dans la traduction. Les Français, et plus particulièrement les joueurs, connaissent de nombreux aspects de la culture américaine véhiculés par la musique, les films, etc. Ainsi, j'ai laissé les noms des chambres en anglais, en partie à cause de difficultés techniques, mais aussi parce que cela ne posait pas de problèmes, l'histoire se déroulant clairement aux Etats-Unis. Toutefois, certains formats bien précis, telles que les dates, ont dû être modifiés pour que le joueur ne soit pas perdu."   

TI : "En cours de traduction, nous pouvions comparer le texte de départ en japonais et la traduction anglaise pour le marché américain. Il y avait des différences flagrantes entre les deux textes et nous avons dû essayer de trouver un équilibre entre le texte de départ et l'adaptation très "roman noir" destinée au marché américain."    

NINTENDO : Pouvez-vous donner des exemples des moments où vous avez dû être créatif pour que le jeu fonctionne dans votre langue ?    

RA : "La première indication qui nous a été donnée était de rendre au mieux le script. Nous ne voulions pas nous retrouver avec des personnages normaux déclamant des tirades comme s'ils étaient au théâtre. Nous nous sommes donnés du mal pour que chaque personnage ait un style propre en fonction de son rôle, et plus important encore, pour qu'il parle normalement.    
"Les dialogues sont primordiaux dans ce jeu. Ils tiennent d'ailleurs le rôle principal. Nous avons donc soigné l'adaptation pour que le joueur n'ait pas l'impression de lire une traduction, mais d'entendre les gens se parler. Nous avons essayé d'utiliser la langue que les gens emploient dans la vie quotidienne."    

FV : "Le texte japonais servait de référence, mais nous avions également le texte américain très éloigné de l'atmosphère originale voulue par les développeurs. NOA avait décidé de personnaliser le jeu pour le rendre plus authentique auprès des joueurs américains, ce que je comprends parfaitement. Le problème est que, parfois, le jeu semblait un peu détaché de la réalité. J'ai vraiment apprécié l'atmosphère japonaise, grave et plus centrée sur l'histoire que sur les personnages. J'ai essayé de rendre cette atmosphère japonaise sans ajouter trop de texte qui aurait ennuyé le joueur.    
"Pour ce qui est du texte en lui-même, le japonais était assez répétitif. Les mêmes messages apparaissaient en plusieurs occasions. Lorsque vous frappiez aux portes ou que vous montriez les objets, etc. J'ai donc essayé d'introduire un peu de variété.    
"Il a parfois été difficile de trouver un style pour des personnages que le public français n'identifie pas au premier coup d'œil. J'ai essayé de trouver un compromis entre les stéréotypes qu'ils véhiculaient, leur représentation graphique et les contextes géographique et temporel dans lesquels l'histoire se déroule."    

FC : "Je me souviens avoir beaucoup travaillé sur le personnage de Louis. Il était aussi bien dépeint que les autres, mais, pour moi, il a été le plus difficile à rendre en italien en raison de tout ce qu'il représente. C'est un vrai dur de New York. C'est le genre de type qui n'existe pas dans la société italienne. Je me suis représenté comment un gars dans son genre vivrait, parlerait et penserait en Italie et j'ai essayé de mettre cette image en avant plutôt que ses paroles. C'est donc pour ça que j'ai utilisé des expressions qui n'existent qu'en italien et le caractère unique de ce personnage m'a permis de donner libre cours à ma créativité !" (rires)    

TI : "Pour faire court, un traducteur de jeux vidéo doit toujours être créatif pour qu'un texte à l'écran fonctionne bien dans sa propre langue. C'est aussi pour cette raison que ce métier est aussi gratifiant." "

Source : Texte : NINTENDO.

JPS

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